Dans le Yoga du Cachemire les postures (āsanas) et les mouvements sont une invitation à éveiller puis explorer le corps subtil, et les tensions et blocages qui émergent.
Plus vaste que le corps physique, le corps subtil, exploré sans intellectualisation dans une expérience tactile, intime et directe, permet l’accueil de sensations différentes, non conceptuelles.
Souvent, nous sommes “collés au corps”, nous identifiant à ses tensions et à son image. Ces tensions, reflets de nos schémas émotionnels et mentaux, sont souvent perçues comme des intrusions à éliminer. La nature du corps étant de ne rien sentir, tout est mis en oeuvre de manière naturelle et instinctive pour revenir à cet état d’harmonie corporelle.
En éveillant le corps subtil, dans une écoute attentive, ouverte et non volitive, et dans une présence totale à ce qui apparaît, nous découvrons une nouvelle dimension corporelle, avec des perceptions, des sensations différentes, et de nouveaux repères.
Le corps physique, ou corps de mémoire, se dissout dans l’accueil et le ressenti de ces nouvelles sensations.
En éveillant le corps subtil, nous entrons dans une relation nouvelle avec le corps : l’identification au “je” s’amenuise et les notions d’espace et de temps nous échappent. Le corps devient un espace de résonance, ouvert et accueillant. Il n’est plus perçu comme un objet à réparer, mais comme un champ de vibrations.
Les tensions se transforment alors, et se manifestent sous la forme de mouvements énergétiques, de densité, d’espace ou de vide. Nous sommes invités à les percevoir, à les écouter, sans appropriation, sans projet, sans commentaire ni jugement.
Dans cet accueil, les énergies bloquées se libèrent et peuvent circuler librement, permettant aux tensions de réintégrer la globalité.
L’exploration du corps subtil se fait tranquillement, sans rien forcer. Il ne s’agit pas de chercher, mais de se donner à l’écoute et à l’accueil de ce qui est là. Parfois cela peut prendre du temps de sentir cet espace vibrant. Il se peut que le mental, qui aime bien tout diriger, garde un certain contrôle, empêchant l’apparition de sensations nouvelles. Rien ne presse, accueillez ce qui se présente. Tout est bienvenu, même la résistance.
Il n’y a rien à faire d’autre que de se donner à cette exploration, comme on partirait en voyage vers des terres inconnues.
Des picotements, des fourmillements, de la chaleur, de la fraicheur, des expansions, des contractions, des vibrations… Tout ce qui est rencontré est bienvenu. Le corps devient vivant, et dans cette relation non-personnelle, chaque perception devient libre de vivre, de se transformer, et de mourir.
Le corps subtil, explorer ainsi, devient alors un portail vers des dimensions plus profondes de l’être. Il nous invite à toucher une vérité plus vaste : celle d’un corps-vibration qui reflète l’unité fondamentale de l’existence où le corps et la conscience se rencontrent dans une danse intime.